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Comment comprendre que le
soleil s'obscurcisse…
L'avant-dernier dimanche « ordinaire », précédant la belle
fête du Christ-Roi, est toujours illustré par des lectures
concernant la fin des temps ou la fin du monde.
Le “retour” de
Jésus Christ à la fin des temps semble, d'après l'évangile
d'aujourd'hui,
devoir s'accompagner de signes vraiment catastrophiques. En
cette année B, où nous lisons l'évangile de saint Marc, nous
ne lisons pas l'entier chapitre 13, qui commence par un long
avertissement de Jésus sur la fin de Jérusalem, sur des
persécutions à venir, sur les faux christ et les faux
prophètes.
Comment
comprendre que le soleil s'obscurcisse, que la lune perde
son éclat, que les étoiles tombent du ciel ? Et qui sont ces
puissances célestes qui seront ébranlées ? Les guerres
atroces du siècle précédent et les actuelles peuvent être
déjà une image du soleil obscurci par les explosions. Les
guerres, les attentats horribles, les accidents d'avion ou
des vols spatiaux se feraient une guerre au-dessus de nos
têtes... Imaginons que la folie s'empare de certains
terroristes et que, non pas deux tours mais dix, mais vingt,
mais cent tours soient anéanties et s'effondrent dans un
immense nuage de poussière et de cendres : le soleil ne
serait-il pas obscurci, et la lune aussi ?
Bien sûr,
cette évocation fait trembler. Mais ces atrocités ne
dépassent pas forcément les souffrances de certains malades,
ou la détresse de tant et tant de foyers abandonnés dans une
misère inhumaine, de tant de réfugiés qu'on a obligés à
quitter maison, terre, troupeaux, pays, et qui meurent de
faim et de maladies. Ce qui est beaucoup plus préoccupant,
c'est de penser à notre état d'âme, au moment de rencontrer
le Christ. La mort de chaque homme est l'occasion de
rencontrer le Christ ressuscité : sommes-nous prêts à cette
rencontre ? Quand nous fermerons les yeux à cette vie, nous
ne verrons plus l'éclat du soleil ou de la lune. Aurons-nous
peur de voir le Fils de Dieu nous tendre les bras et nous
accueillir avec douceur dans Son Royaume ? Ou
préférerons-nous nous en détourner pour rejoindre les
ténèbres ?
D'autres
expressions de l'évangile peuvent nous interpeller. Ainsi,
pourquoi le Christ parle-t-il du figuier plutôt que des
plantes en général, puisque toutes les plantes reprennent
vie au printemps et annoncent le prochain été ? C'est que le
figuier est un arbre “particulier” ; on a déjà lu que Adam
et Eve se couvrirent de feuilles de figuier (Gn. 3:7) : ils
se firent là le premier “cilice”, en signe de pénitence, car
les feuilles de figuier sont extrêmement rêches sur un côté.
Mais le figuier a aussi d'autres particularités : on dit que
s'endormir sous un figuier provoque un très violent mal de
tête. Curieusement aussi, le figuier ne montre pas de fleur
au printemps : on dit que sa “fleur” est interne au fruit,
qui d'ailleurs est extrêmement doux, comme chacun sait.
Ainsi donc, Jésus fait observer qu'après ces feuilles
rêches, arrivera bientôt le fruit qui est si doux. C'est une
invitation à rester dans l'espérance, mais aussi dans la
pénitence, en acceptant de bon gré les difficultés de la
vie.
Et de quelle
“génération” parle le Christ ? Evoque-t-il toujours et
seulement la chute de Jérusalem et la fin du royaume
d'Israël ? Ou quelque chose qui nous concerne nous aussi ?
Comment comprendre cette “génération” ? Certainement : si
“le ciel et la terre passeront”, c'est qu'un jour finira la
génération humaine (quand le nombre des élus sera atteint)
et que ne subsisteront que les saintes Paroles du Christ, et
sa promesse de Vie éternelle. Et pourquoi le Christ dit-il
un “petit mensonge”, affirmant que “même le Fils” ne connaît
pas le jour ni l'heure de ces événements ? Nous savons bien
que le Fils de Dieu connaît tout ce que fait son Père, après
qu'il ait dit à la dernière Cène : “Je suis dans le Père
et le Père est en moi. Les paroles que je vous dis, je ne
les dis pas de moi-même ; le Père qui demeure en moi
accomplit les œuvres” (Jn. 14:10).
En réalité,
bien évidemment le Christ ne nous révèlera jamais le moment
précis où ce monde finira, ni même particulièrement l'heure
précise de notre mort. S'il le faisait, nous serions trop
tentés de remettre à plus tard le moment de nous préparer
vraiment à Le rencontrer, alors que le Christ nous conseille
instamment de “veiller et prier” sans cesse, pour être
toujours prêts quand Il reviendra (Mt. 24:44 ; 25:13).
Tandis que le
prophète Daniel évoque déjà en son temps (IIe siècle avant
J. C.) la résurrection finale, le psaume 15 est un chant de
confiance du Christ, le Juste, le Saint, qui ne restera pas
dans les liens de la mort et qui ressuscitera. Tous ceux qui
vivent de la Vie du Christ connaîtront cette résurrection.
Le Christ est
notre Prêtre, éternel et souverain Sacrificateur. Son
Sacrifice unique et parfait a obtenu “pour toujours”, dit
saint Paul, le pardon aux hommes pécheurs. Ce qui est un peu
difficile à comprendre, comme on l'a dit
dimanche
dernier, c'est qu'il soit inutile d'offrir d'autres
sacrifices après celui du Christ, alors que chaque jour les
prêtres offrent fidèlement le Saint Sacrifice, prenant ainsi
la relève des prêtres du Temple juif, qui “étaient debout
dans le Temple pour célébrer une liturgie quotidienne”.
La différence fondamentale est que ces prêtres offraient
chaque jour de nouvelles victimes, des agneaux, des veaux,
des bœufs, des génisses, des colombes, en grande quantité,
tandis que le Christ s'est offert lui-même, et qu'à sa
suite, les prêtres de l'Eglise n'offrent pas un autre
Sacrifice que celui du Christ : en vertu de leur sacerdoce,
ils actuent l'unique Sacrifice du Christ, dont l'Eglise
applique les mérites divins à toutes les âmes.
Que deviendra
alors le Sacerdoce dans la Vie éternelle ? Il restera un
éternel Sacrifice de louange et d'action de grâces, une
prière solennelle à Dieu tout-puissant : la Rédemption sera
désormais consommée et achevée : “Les sages, dit
Daniel, brilleront comme la splendeur du firmament, et
ceux qui instruisent des multitudes vers la Justice
resplendiront comme les étoiles dans les siècles des
siècles.”
Abbé Charles Marie de Roussy
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