Alexandrina de Balasar
(30 mars 1904-13 octobre 1955)
par
Paulette Leblanc

PREMIÈRE PARTIE

Introduction

Alexandrina Maria da Costa de Balasar est une mystique portugaise, béatifiée le 25 avril 2004 par le pape Jean-Paul II. La Consécration du monde au Coeur Immaculé de Marie, consécration, faite par Pie XII en 1942, est son œuvre.

Alexandrina fut béatifiée le 25 avril 2004 par le pape Jean-Paul II  

Nous avons la chance de connaître de nombreux détails de la vie spirituelle d'Alexandrina Maria da Costa de Balasar. Ses directeurs spirituels ont parlé d'elle avec admiration, mais sans cependant rapporter tout ce qui faisait la richesse et la profondeur de sa vie d'union à Dieu, et, sans la présence constante auprès d'elle de sa sœur aînée, Deolinda, sa fidèle secrétaire, l'essentiel des liens qui unissaient Alexandrina à son Seigneur nous serait inconnu. Les saints que nous admirons et que nous prions, ne sont souvent devenus des saints canonisés, donc connus, que parce qu'auprès d'eux il y avait des âmes dévouées, humbles et patientes qui ont tout noté patiemment ce qui se disait et ce qui se passait. On ne devrait jamais oublier ces saints-là, ces inconnus fidèles, ces saints de tous les jours qui sont nos vrais modèles, à nous gens ordinaires.

I

La vie d'Alexandrina

1-1-L'enfance

Alexandrina Maria da Costa naquit à Gresufes, paroisse de Balasar, petit bourg situé  à environ 50 kilomètres de Porto, dans l'Archidiocèse de Braga, le 30 mars 1904, d'un milieu de paysans honnêtes et travailleurs. Elle fut baptisée le Samedi Saint suivant, 2 avril 1904.

Il faut mentionner ici un fait étonnant: dans une vallée voisine et située en face de l'église, se trouve une chapelle, construite en 1832, à l'endroit même où, en la fête du Corpus Domini, une croix dessinée à même la terre, mais d'une terre différente, est apparue. Un siècle avant l'offrande d'Alexandrina, Jésus préparait la Croix sur laquelle il installerait sa victime.

La Mère d'Alexandrina eut, du même homme, deux filles illégitimes, Deolinda et Alexandrina. Aussitôt après la naissance de Deolinda, l'individu qui avait promit de l'épouser s'en alla au Brésil. Après son retour au Portugal, il revit la mère de Deolinda, et Alexandrina vint au monde. Puis cet homme l'abandonna de nouveau pour épouser une autre femme. Les témoins locaux rapportent qu'à partir de ce moment, la mère eut un comportement irrépréhensible.

Alexandrina passa les cinq premières années de sa vie chez ses grands-parents maternels. En janvier 1911, vers l'âge de six ans, elle dut partir, avec sa sœur, Deolinda, à Póvoa de Varzim afin de pouvoir fréquenter l'école, car il n'y avait pas d'école de filles à Balasar. C'est là qu'elle fit sa première Communion. Les deux fillettes revinrent dans leur famille en juillet 1912.

Vers l'âge de 9 ans, Alexandrina dut commencer à travailler, d'abord dans les champs, puis comme journalière, femme de ménage et couturière, chez des voisins. Il convient de noter ici que, toute jeune, et même pendant le travail, elle priait beaucoup. Bientôt elle fut nommée catéchiste et membre de la chorale.

1-2-Les premières épreuves

Un jour, Alexandrina tomba d'un chêne. Puis elle devint gravement malade et dut cesser de travailler régulièrement. A 12 ans les derniers sacrements lui furent administrés. Sa santé continua à se dégrader et elle dut abandonner les travaux dans les champs, par manque de forces. Elle commença dès lors à se plaindre aussi de douleurs à la colonne vertébrale; ce mal s'aggrava par la suite. On disait qu’elle souffrait de myélite. La maman rapporte que le médecin qu’elle avait consulté, le docteur João de Almeida, de la maison de santé de Carcereira, lui avait dit qu’il s’agissait de myélite et qu’elle deviendrait paralysée. (D'après des témoignages de Maria da Conceição Leite Reis Proença, dite Sãozinha)

Le Samedi Saint 1918, Alexandrina sauta par une fenêtre d'une hauteur d’environ quatre mètres, plutôt que de se laisser violenter par trois hommes qui étaient entrés dans la pièce où, avec sa sœur et une amie, elle faisait de la couture. Il en résulta une compression de l'épine dorsale, cause de l'accélération de sa paralysie qui la retint au lit pendant 30 ans. En 1922, un spécialiste de Porto, le docteur Abel, confirma le diagnostic précédent à son médecin traitant, le docteur Garcia: sa patiente ne guérirait jamais.

Pendant cinq mois consécutifs Alexandrina ne put se lever, mais en avril 1923 elle recommença à marcher un peu en s'aidant d'une chaise. La mort de sa grand'mère fut pour elle un grand chagrin. En juin, elle put participer au Congrès Eucharistique National, de Braga. Mais le 14 avril 1925, elle devait s'aliter définitivement. Deolinda, sa sœur devint son infirmière et sa secrétaire.

1-3-La vie d'union à Dieu

1-3-1-L'offrande

Alexandrina aurait bien voulu guérir. Mais malgré ses nombreuses et ardentes prières, elle n'obtint pas cette grâce; elle comprit alors que Jésus désirait autre chose d'elle, et elle s'offrit comme victime pour le salut des âmes, "sentant toujours davantage le désir d'aimer la souffrance et de ne penser qu'à Jésus seul." Nous sommes en 1930.

Elle dit alors à Jésus:

"Mon bon Jésus, vous êtes emprisonné. Moi aussi, je le suis. Nous sommes tous deux incarcérés. Vous, pour mon bien et moi, enchaînée par vous. Vous êtes Roi et Seigneur de tout. Moi, je ne suis qu’un ver de terre. Je vous ai négligé, ne pensant qu’aux choses du monde qui ne sont que perdition pour les âmes, mais, maintenant, le cœur contrit, je ne veux que ce que vous voudrez, je veux souffrir avec résignation. Ne me laissez pas sans votre protection."  C'est peu de temps après, vers 1931, qu'Alexandrina composa son Hymne en l'honneur des tabernacles.

Curieusement, la récitation de cette prière lui causait des effets qu’elle ne comprit pas tout de suite... Elle explique :

“Pendant que je faisais cette offrande à Jésus, je me sentais ravie, d’une façon que je ne sais pas expliquer, et en même temps je ressentais une forte chaleur qui semblait m’embraser. Cela me parut étrange, car les journées étaient plutôt froides et, émerveillée, j’ai même regardé si mon corps ne transpirait pas. C’est comme si l’on m’embrassait intérieurement. Cela me fatiguait assez.”

Cela lui parut tellement étrange qu'elle demanda à sa sœur Deolinda et à son amie Sãozinha, si elles ressentaient, elles aussi, cette même agréable sensation lors de leurs prières... Plus encore, comme elle leur expliquait qu’elle ressentait une chaleur assez vive, on lui posa sur la poitrine des chiffons mouillés à l’eau froide...

1-3-2-Le Cœur de Jésus

Alexandrina raconte: "Une certaine fois j'ai vu Jésus tel un jardinier qui soigne ses fleurs, les arrosant, etc. Il se promenait au milieu de celles-ci, m'en montrait les variétés. D'autres fois il m'apparaissait pour me montrer les rayons éblouissants de son Cœur." Un autre jour, Jésus lui demanda: " Donne-moi ton cœur, que je le place dans le mien, afin que tu n’aies pas d’autre amour que le mien et celui de mes affaires (Lettre du 5 octobre 1934 au Père Mariano).

Alexandrina se consacra au Cœur de Jésus, par cette prière:

"O mon Jésus, je me consacre toute à vous. Que votre Cœur me soit grand ouvert. Permettez que je rentre dans cette Fournaise ardente, dans ce Feu brûlant. Fermez-le sur moi, mon bon Jésus; que j’y demeure pour y rendre mon dernier soupir, (Lettre du 17 octobre 1934 au Père Mariano Pinho) enivrée de votre divin Amour. Ne souffrez pas que je me sépare de vous sur la terre, sinon pour m’unir à vous, éternellement, dans le ciel."

Anticipons un peu: nous sommes le 1er octobre 1954, premier vendredi du mois.  Après qu'Alexandrina eut revécu la Passion, Jésus lui dit:

"Comme je l'ai demandé à Marguerite-Marie Alacoque, je veux que toi, à ton tour, tu fasses se développer dans le monde cet amour éteint dans le cœur des hommes... Fais, ô mon épouse, fais que se propage dans le monde entier cet amour de nos Cœurs.” (de Jésus et Marie).

1-4-La vie adulte

1-4-1-Jésus prépare Alexandrina à sa future mission

La maman d'Alexandrina s'étant portée caution en faveur de parents qui ne tinrent pas leurs engagements, l'année 1933 et les suivantes, jusqu'en 1941, furent matériellement difficiles pour la famille da Costa [1]. Heureusement de grandes consolations soutinrent Alexandrina: le Père Mariano Pinho, jésuite, devint son directeur spirituel, et dès novembre 1933, des messes purent être célébrées dans sa chambre.

En 1934, après avoir fait le "vœu du plus parfait", Alexandrina entendit, à plusieurs reprises, Jésus lui demander de participer à sa Passion, en se laissant transpercer les mains et les pieds par des clous, et la tête par des épines.

Jésus lui dit:

«Donne-moi tes mains: je veux les clouer avec les miennes; donne-moi tes pieds: je veux les clouer avec les miens; donne-moi ta tête: je veux la couronner d’épines, comme ils me l’ont fait à moi; donne-moi ton cœur: je veux le transpercer avec la lance, comme ils ont transpercé le mien; consacre-moi tout ton corps; offre-toi toute à moi; je veux te posséder entièrement.»

Ces invitations de Jésus à participer à sa Passion se répétèrent plusieurs fois pendant environ quatre ans. Jésus la préparait progressivement au grand événement du 3 octobre 1938. Ce jour-là, en effet, Alexandrina vécut pour la première fois la Passion de Jésus dans ses diverses phases.

1-4-2-Les phénomènes mystiques

Le 30 juin 1935, Jésus fit part à Alexandrina, pour la première fois, de son désir de voir le monde consacré à la Vierge Marie. Puis vinrent d'autres événements déconcertants:

– Le 7 juin 1936, le jour de la fête de la Très Sainte Trinité, eut lieu un phénomène dramatique: la mort mystique. Alexandrina avait annoncé sa mort; elle mourut, en effet, ou sembla mourir, après s'être longuement préparée. Mais, elle revint à elle au bout d'un certain temps, alors qu'autour d'elle, on la pleurait déjà.

– Fin avril 1937, Alexandrina fut de nouveau au seuil de la mort: pendant 17 jours elle ne put rien avaler, sauf l'Hostie consacrée.

1-4-3-Les attaques démoniaques

Comme il le fait pour la plupart des âmes consacrées et saintes, le démon commença bientôt à tourmenter Alexandrina. Puis les "assauts du démon" s'intensifièrent. Dans son Autobiographie on peut lire:

“Ce fut en juillet 1937 que le “boiteux” ou "le manchot" (noms qu'elle utilisait pour désigner le démon), non content de tourmenter ma conscience et de me souffler des choses affreusement ordurières, commença à me mettre en bas du lit, aussi bien la nuit qu'à n'importe quelle heure de la journée... Pendant ces assauts je ressentais en moi la rage et la fureur infernales. Je ne consentais pas que l’on me parle de Jésus et de Marie, ni même de voir leurs images : je leur crachais dessus et les piétinais. Je ne pouvais pas non plus sentir la présence de mon Directeur spirituel: je l’insultais et voulais même le frapper, ainsi que quelques personnes de la maison. Mon corps devenait violet et sanguinolent à cause des morsures. Je disais pareillement des gros mots envers les personnes présentes. Oh! Combien j’aimerais que beaucoup aient pu le voir, afin qu’ils craignent l’enfer et arrêtent d’offenser Jésus!"

Dans sa rage, le monstre infernal alla jusqu’à lui voler son crucifix pour le jeter dans la porcherie... De la même façon il lui subtilisa une statue de la Sainte Vierge et l'enterra dans le jardin; on ne la retrouva que quelques années plus tard... Comme Alexandra se plaignait, Jésus lui dit un jour:

"Le démon te hait, mais tu dois t’en réjouir, car tu connais la raison. Si je le permettais, il te tuerait: mais je n’y consens pas. Je suis le Seigneur de la vie et de la mort. Ta mort, en tout cas, ne sera qu’un envol de la terre vers le ciel".

1-5-La passion d'Alexandrina

1-5-1-Les ténèbres

Le 30 septembre 1938, le Père spirituel d'Alexandrina vint lui prêcher une retraite. Ce fut une terrible période de ténèbres. Alexandrina raconte: "Mon âme se trouvait vivre dans de grandes agonies et, quelquefois, je me sentais sur le point de tomber dans des abîmes épouvantables. Pendant les jours de retraite, mes souffrances ont redoublé et ces abîmes sont devenus terrifiants. La justice du Père éternel tombait sur moi et souvent me criait: 'Vengeance, vengeance, etc…' pendant que les souffrances du corps et de l’âme augmentaient. Il est impossible de les décrire; il est nécessaire de les avoir senties et vécues. Je passais les jours et les nuits roulant sur mon lit, en entendant la voix puissante du Père Éternel."

1-5-2-La première passion d'Alexandrina

Enfin, le 3 octobre 1938, Alexandrina vécut la Passion pour la première fois, dès midi et jusqu'à 15 heures. Ce jour-là, jour de sa fête liturgique, sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus apparut à Alexandrina, à deux reprises, au cours de cette première “Passion”.

Le Père Pinho était présent. Dans son livre ”No Calvário de Balasar" (Sur le Calvaire de Balasar) il écrira: "Nous les présents, nous voyions se dérouler devant nos yeux et très concrètement, le drame de la Passion, au Jardin des Oliviers, l'emprisonnement, les tribunaux, la flagellation, le couronnement d'épines, le chemin du Calvaire, la crucifixion et la mort."

1-5-3-Les autres passions

Désormais, Alexandrina revivra la Passion de Jésus tous les vendredis. Le 24 octobre 1938, le Père Pinho, après avoir assisté à la Passion d'Alexandrina, écrivit au Cardinal Pacelli (futur Pie XII) au sujet de la Consécration du monde à la Vierge Marie.

Le 29 Janvier 1941, le docteur Manuel Augusto Dias de Azevedo vînt pour la première fois auprès d'Alexandrina. Il comprit qu'il s'agissait d'une manifestation surnaturelle et il décida d'étudier ce cas à fond. Il devint son médecin. En août 1941, une indiscrétion grave commise par le Père José Alves Terças, fut la cause de grandes souffrances pour Alexandrina. Jésus lui dit alors:

"L'heure de me donner la plus grande preuve d'amour et d'héroïsme est arrivée: marche sans lumière, en complet abandon. Tout sera mort en toi..."

1-5-4-Les passions invisibles

Le 27 mars 1941 Alexandrina revécut la Passion, pour la dernière fois de façon visible: c'était le vendredi de Notre-Dame des Douleurs. Par la suite, selon ce qu'écrivit le Père Pinho dans sa biographie “No Calvário de Balasar”, tous les vendredis, elle continua à revivre la Passion de Jésus, pendant laquelle elle souffrait encore plus qu'auparavant.

Le 2 février 1945, Alexandrina vécut un vendredi encore plus douloureux que les autres. Voici quelques extraits de ce qu'elle a raconté dans son autobiographie:

“Le vendredi est arrivé; triste vendredi!... Dans mon âme je ressentais une mansuétude, une bonté inégalable. En même temps, contre cette mansuétude et cette bonté, je ressentais la haine, la rancœur, le mépris et une autorité orgueilleuse: un orgueil cynique. Des bêtes féroces contre l’Agneau... Avant même que la sentence ne soit prononcée contre l’Agneau innocent, j’ai senti que cette autorité là, avec une fureur diabolique, se déchirait les habits de haut en bas...

J’ai monté avec peine la montagne du Calvaire... Mon sang coulait. Mon âme tremblait de douleur et de peur, comme le corps tremble à cause du froid.

1-5-5-Après la passion du 2 février 1945

Alexandrina continue son récit: "À haute voix toujours j’appelais Jésus. Il est venu apportant un soleil radieux et ardent. Les tremblements de mon âme ont cessé, ainsi que la peur et toutes les douleurs: j’avais retrouvé la paix, je n’avais plus que lumière et amour. Le cœur a commencé à revivre une vie que je ne sais pas expliquer. La poitrine est devenue un vrai incendie. Quel bonheur j’ai pu vivre pendant longtemps!... J’ai entendu des hymnes merveilleuses; je ne comprenais pas très bien, mais je sais qu’elles étaient adressées à Jésus au très Saint-Sacrement."

En effet, la Passion terminée, Alexandrina entendit les anges chanter et constata que "de ce chœur d’anges sortait un canal qui arrivait jusqu’à elle, lui communiquant des flammes de feu et bien d’autres choses."  Jésus lui dit alors:

"Ce canal, ma fille, descend du Cœur de ta Mère et ma Mère bénie. De celui-ci tu reçois la très grande abondance de notre amour; tu reçois nos grâces, vertus et dons: richesse divine et tout ce qui est du ciel. De son Cœur tu reçois la vie pour vivre, la vie pour la donner aux âmes. C’est cette rosée, le sang que tu sens tomber sur l’humanité; c’est une fusion de mes richesses, de mes grâces et de ta souffrance. Tu es une nouvelle co-rédemptrice."

Depuis le mois d'août 1945, et pendant environ trois mois, elle perdit quotidiennement du sang. À partir de juillet 1946 et jusqu'à sa mort, elle ressentit, même en dehors des extases de la Passion, les douleurs de ses stigmates, lesquels, à sa demande, restèrent toujours invisibles.

1-6-Le jeûne

A partir du 13 avril 1942 le jeûne total va commencer, lequel durera jusqu'à sa mort.

Du 10 juin au 20 juillet 1943, Alexandrina sera internée à l'hôpital de Foz do Douro, près de Porto pour y subir une série de contrôles concernant son jeûne et son anurie. Quarante jours de surveillance constante! Aucune simulation n'est constatée. Peut-être va-t-on laisser Alexandrina en paix...

Hélas! Le 16 juin 1944, trois théologiens nommés par l'archevêque de Braga, pour une commission d'enquête, ne trouvèrent rien de miraculeux au cas d'Alexandrina, malgré la poursuite de son jeûne... Une étonnante persécution va commencer: il fallait "faire taire la malade."

Le Père Umberto Maria Pasquale devient le directeur spirituel d'Alexandrina, en remplacement du Père Pinho, écarté, suite à une campagne de calomnies.

Pendant 12 ans Alexandrina ne vécut que de l'Eucharistie. Jésus lui dit un jour, en 1954: "Ma fille, je t'ai placée dans le monde et je fais en sorte que tu vives uniquement de Moi pour prouver au monde ce que peut l'Eucharistie, ce qu'est Ma vie dans les âmes: lumière et salut pour l’humanité."

Le jeudi 13 octobre 1955, Alexandrina retournait vers Dieu qu'elle avait tant aimé. (voir annexe 3)

1-7-Alexandrina prophète

1-7-1-Sacrilèges contre l'Eucharistie

Un vendredi de 1945, au cours d’une Passion, Alexandrina eut une vision terrible au sujet de l'avenir. Bien longtemps avant le Concile Vatican II elle écrivit:

«Quel feu dans mon cœur !... Combien je donnerais, combien j’aimerais souffrir pour obtenir que ce feu soit le mien et qu’il soit un feu d’amour pour Jésus. Je veux de l’amour, je veux de l’amour pour le donner au monde afin qu’il aime uniquement Jésus... Je vois le monde s’enfuir vers un autre monde, un monde de perdition.

Je reste les bras ouverts et les yeux levés vers le ciel. Comment remédier à ce mal? De grandes, de très grandes inquiétudes montent de la terre vers le ciel. Mon Dieu, je vois les âmes pleines de lourdeur et les corps détruits par la lèpre: conséquences du péché. Quelle lumière, celle qui m’oblige à tout voir!... À quel extrême le monde est réduit!... Doux Jésus, votre divin Cœur n’en peut plus!...

Je me sens placée entre le monde et Jésus afin d’éviter que la méchanceté des hommes ne blesse son Cœur si aimant. Flagellation, épines et mauvais traitements me blessent. Je ne vois pas Jésus mais je le sens comme opprimé, rempli d’épouvante et qui attend les coups de cette chaîne de méchanceté...

Sans même avoir pensé à la Cène de Jésus avec ses disciples, je me suis sentie à table. Mon cœur était le calice, le vin et le pain. Tous venaient manger et boire à ce calice. À partir de cet instant cette Cène allait se répéter. Mais quelle horreur ce que j’ai vu!... Tant de Judas buvant et mangeant indignement! Que de langues sales! Pire encore: combien de mains indignes distribuant ce pain et ce vin; des mains indignes et des cœurs démoniaques.

Quelle horreur mortelle!... J’en ai éprouvé tant de douleur et tant d’horreur au point de croire que mon âme allait fondre et le cœur se briser. Je ne sais pas mieux exprimer ce que j’ai vu, ce que j’ai souffert. Et avant tout autre chose, l’amour de Jésus, un amour indicible; un amour que l’on ne peut évaluer qu’après l’avoir expérimenté…" (Autobiographie: 12 avril 1945)

Remarque importante

Ces textes ont de quoi nous affliger. En effet, en 1945, les fidèles recevaient l'hostie consacrée uniquement sur la langues, et jamais les laïcs ne distribuaient la communion. Comment Alexandrina aurait-elle pu deviner ou inventer ces choses? Il faut également ajouter qu'en 1945, une telle révélation devait être incompréhensible. Et pourtant, aujourd'hui, n’importe qui peut distribuer la Communion, et bien rares sont les personnes qui se confessent pour recevoir le Sacrement de l’Amour. Aussi doit-on considérer les paroles d'Alexandrina comme une vraie prophétie.

1-7-2-Annonce de la guerre

En 1935 et en beaucoup d'autres occasions, le Seigneur, en lui annonçant la guerre comme châtiment des nombreux péchés de l'humanité, lui disait:

"Ce seront les victimes de mes Tabernacles qui arrêteront le bras de la Justice divine, pour que le monde ne soit pas détruit et que de plus grands châtiments n'adviennent."

La même année, Jésus lui  ordonna de demander au Saint-Père la consécration du monde au Cœur Immaculé de Marie, et l'institution de la fête liturgique. 

1-7-3-Élection de Pie XII

Tout de suite après l'élection du Pape Pie XII, Jésus lui prédit le 27 mars 1939: "C'est lui le Pontife qui consacrera le monde au Cœur Immaculé de Marie, ma Mère." Trois ans après, cette parole de Jésus s'accomplissait.

Nous avons vu que pendant la guerre, Alexandrina s'était offerte comme victime pour la paix, et pour le Pape à qui elle écrivit pour le rassurer et lui dire qu'il serait protégé des dangers au sein des catastrophes internationales. D'ailleurs, le Seigneur lui avait dit, le 6 décembre 1940:

"La paix viendra, mais au prix de beaucoup de sang. Le Saint-Père sera ménagé. Le dragon orgueilleux et enragé, qui est le monde, n'osera pas toucher à son corps, mais son âme sera victime de ce dragon."

Puis, dans l'isolement de sa chambre, tourmentée par des souffrances indescriptibles, elle se consacra aux Tabernacles pour réparer les profanations eucharistiques et l'abandon où le Seigneur est laissé par ses créatures. A cette école elle apprit à s'immoler comme victime pour les pécheurs.

II

La Consécration du monde à Marie

2-1-Rôle de Marie dans la vie d'Alexandrina

Le 1er mai 1935, Alexandrina priait et demandait à Marie de la placer auprès des tabernacles: "Mère de Jésus et ma Mère, écoutez ma prière: je vous consacre mon corps et mon cœur. Purifiez-le, Mère très Sainte; remplissez-le de votre amour. Placez-le vous-même auprès des Tabernacles de Jésus, afin qu’ils servent de lampe jusqu’à la fin du monde."

Alexandrina ne pouvait agir qu'avec Marie. Nous avons vu plus haut, que le 2 février 1945 Jésus lui avait fait cette révélation: "Je te communique tout à travers le canal de ma Mère bénie: c’est à vous qu’il appartient de sauver le monde."

En 1949, Marie vint lui apporter le Rosaire "avec lequel elle devait attacher le monde."

2-2-La consécration du monde à Marie

Nous nous souvenons aussi que le 30 juin 1935, Jésus avait demandé la consécration du monde à Notre-Dame. Il avait dit à Alexandrina:

"En raison de l’amour que tu as envers ma très Sainte Mère, communique à ton directeur spirituel la demande suivante: que chaque année un acte de consécration du monde à ma Mère soit fait, un jour fixé et que l’on demande à la Vierge sans tache de confondre les impurs, afin que ceux-ci changent de vie et ne M’offensent plus davantage. Comme J'ai demandé à Marguerite-Marie la consécration du monde à mon divin Cœur, ainsi Je te demande à toi, qu’il soit consacré à Marie au cours d'une fête solennelle.” [2]

Le Père Mariano Pinho, son directeur, avait d'abord semblé très perplexe sur ce sujet, mais peut-être en avait-il cependant parlé autour de lui, car, le 31 mai 1937, Alexandrina recevait la visite du Père Antonio Durão, jésuite, en  qualité d'envoyé du Saint-Siège, pour la questionner sur la consécration du monde à Notre-Dame.

Puis, le 24 octobre 1938 le Père Pinho  écrivait à Rome. En effet, lors de plusieurs extases, Alexandrina avait entendu Jésus demander au Père Pinho d'écrire au Pape au sujet de la consécration du monde. Le 5 janvier 1939, c'est le chanoine Vilar, envoyé par le Saint-Siège, qui fut chargé d'enquêter sur la consécration du monde à la Vierge. Le 20 janvier, Jésus prédit la guerre, châtiment pour les grands péchés:

"Le monde est suspendu à un fil très fin... Ou le Pape se décide à le consacrer ou le monde sera puni!..."

28 juin 1939, comme le 20 janvier et le 13 juin, Alexandrina entendit Jésus renouveler sa prédiction. Alexandrina s’offrit comme victime pour la paix.

Enfin, le 31 octobre 1942, à l'occasion du 25e anniversaire des apparitions de Fatima, le Pape Pie XII, élu le 2 août 1939, fit, en langue portugaise, la consécration du monde au Cœur Immaculé de Marie, consécration qui sera renouvelée solennellement à Saint-Pierre de Rome, le 8 décembre de la même année.

2-3-Le Portugal épargné

À plusieurs reprises, en 1940, Jésus avait insisté sur la nécessité de consacrer le monde à sa Mère bénie. Le 4 juillet de la même année, Alexandrina s'offrit comme victime, avec d'autres âmes-victimes, pour obtenir qu'au moins le Portugal soit épargné par la guerre. Jésus accepta cette offrande, et le Portugal fut sauvé.

Le 15 septembre 1940, Alexandrina écrivit au Patriarche de Lisbonne, le Cardinal Cerejeira, et au chef du Gouvernement, Salazar, pour leur demander de faire ce qui était en leur pouvoir "afin de freiner les débordements de l'immoralité".

3

Portrait d'Alexandrina

3-1-Alexandrina vue par le Père Umberto

Le Père Umberto Maria Pasquale admirait beaucoup l'âme d'Alexandrina "aussi humaine et spirituellement parfaite sous tous les aspects." Et le Père d'énumérer ses principales qualités:

– l’obéissance à l’Autorité ecclésiastique et à ses directeurs;

– la patience mise à rude épreuve que ce soit à cause de la maladie ou à cause du nombre de personnes qui venaient la visiter inopportunément;

– la charité envers le prochain, en particulier envers ceux qui lui causaient de très graves chagrins...

C’était vraiment une créature consacrée d’une manière totale à son Dieu, en esprit d’immolation, pour réparer les offenses qui Lui sont continuellement dirigées, et pour Lui sauver des âmes, toutes les âmes.

3-2-L'obéissance

Ce furent ces vertus qui conduisirent le Père Umberto à exiger d’Alexandrina la dictée de ses “Sentiments de l‘âme", véritable portrait de sa spiritualité. Alexandrina écrit:

"Ce fut seulement au mois d’août 1934 que je me suis décidée à ouvrir mon cœur à mon Père spirituel, venu à Balasar pour une série de sermons. J’ai eu peur, alors, qu’une fois au courant de ma vie, il ne veuille plus continuer de me diriger. Alors même que je me débattais avec ce doute, Jésus m’a dit:

– Obéis en tout: ce n’est pas toi qui l’as choisi, mais moi qui te l’ai envoyé.

Quand le Père m’a demandé de quelle façon j’avais entendu lesdites paroles, il ne m’a pas expliqué si elles étaient ou non de Jésus."

3-3-La patience et l'amour de la souffrance

3-3-1-Martyre du cœur

"J’aspire après l’éternité, nous dit Alexandrina, car là seulement je saurai remercier Jésus de m’avoir choisie pour vivre cette vie de sacrifice, désireuse toujours d’aimer Jésus et de sauver les âmes. Je sais que très peu personnes me comprendront, mais à moi, une seule chose me suffit: Jésus comprend tout.

J’aime Jésus, j’aime la Petite Maman, j’aime la souffrance, et ce n’est qu’au Ciel que je comprendrai la valeur de toute ma souffrance!!!"

Lisons encore Alexandrina: "En même temps que les grâces divines augmentaient, augmentaient aussi les doutes et la peur de me tromper et de tromper mon Directeur ainsi que tous ceux qui vivaient autour de moi. Mon martyre augmentait, lui aussi, de plus en plus: il me semblait que tout était faux et inventé par moi. Mon Dieu, quel coup pour mon cœur! Les ténèbres m’enveloppaient: je n’avais aucune lumière pour me montrer le chemin. Mon Directeur faisait pourtant bien des efforts pour me redonner confiance, mais rien n'y réussissait. Malgré cela, je me faisais violence pour m’abandonner dans les bras de Jésus, afin de ne pas être prise dans le tourbillon."

Et cet abandon dans les bras de Jésus ne fut pas toujours de tout repos. Revivons avec Alexandrina quelques épisodes de son séjour à l'hôpital de Foz de Douro, en 1943:

"Je peux toutefois dire que j’ai offert au Seigneur mes yeux, qui sont ce que j’ai de plus cher dans mon corps, si cela était nécessaire pour la conversion d’Hitler, de Staline et de tous les autres fauteurs de guerre..."

Alexandrina est étroitement surveillée. Sa sœur Leolinda, ne peut pas l'approcher, ni même l'aider à se retourner dans son lit. Seules des infirmières très "sûres" peuvent lui donner les soins indispensables. Alexandrina est seule...

"Pendant la nuit, quelquefois, je me demandais: 'Que peut faire ma sœur, à cette heure-ci? Pleure-t-elle?' Pensant qu’elle souffrait à cause de moi, une fois je n’ai pas pu retenir mes larmes. Combien j’ai alors pleuré! Je n’avais qu’une crainte: déplaire à Jésus. Mais Lui, Il savait que j’acceptais tout par amour pour Lui, avec un immense désir de Lui gagner des âmes. En effet, je Lui ai offert mes larmes comme autant d’actes d’amour pour les Tabernacles. Plus la désolation est grande, plus grand est aussi l’amour, n’est-ce pas ainsi, mon Jésus? Acceptez tout cela.

Le seizième et le trentième jour de mon séjour, j’ai reçu la visite de maman. J’avais une si grande envie de la voir! Elle n’a pu rester que très peu de temps avec moi et toujours sous le regard inquisiteur des surveillantes. Elle pleurait et moi, je faisais semblant de ne pas avoir de chagrin: je lui souriais, je plaisantais avec elle, je la cajolais, et avec mon sourire trompeur, je cachais la tristesse de mon âme, en retenant les larmes qui à tout prix voulaient couler. Je l’ai encouragée, m’épanchant intérieurement avec Jésus. C’était ma croix: ne devais-je pas la porter par amour de Jésus qui est mort pour moi?"

3-3-2-Le martyre de l'âme. Les calomnies

Très vite le "cas" Alexandrina fut connu dans le pays, et au-delà. Les jugements, tous téméraires, mais pas innocents, se multipliaient. Quelle souffrance pour l'intéressée!

"Je souffrais beaucoup à cause des larmes de ceux qui m’entouraient et, je pensais: 'Mon Dieu, si le courage leur manque, comment n’en manquerais-je pas?' Ma famille ne me rapportait pas les nouvelles qui circulaient, mais, malgré cela, j’ai appris les commentaires que l’on faisait sur ma vie. Pauvres ignorants, combien de mensonges ils diffusaient! Quelques-uns affirmaient que mon voyage à Porto avait pour but d’obtenir une pension mensuelle de la part de Monsieur Oliveira Salazar (alors Président du Conseil portugais); ils parlaient même de chiffres absurdes et discordants: 500 escudos pour les uns, 300 ou 200 pour les autres; aucune tentative ne réussissait à faire taire de tels mensonges.

D'autres, pour en finir, disaient que je faisais la 'voyante': en effet des personnes sont venues chez nous pour connaître leur avenir. Je les recevais avec beaucoup de sérénité, feignant ne pas comprendre leur manège, mais quand elles insistaient, je leur répondais:

Je ne suis pas voyante, personne ne peut deviner l’avenir. Nous n’avons pas le droit de pénétrer dans la pensée d’autrui. Seul le Seigneur le connaît"

Le 10 mars 1950, Alexandrina eut une vision de l'enfer. Par ailleurs, les visites de personnes de l'extérieur ne cessaient pas, jusqu'à 15000 durant la journée du 29 juin 1953. Et pourtant Alexandrina vivait de plus en plus douloureusement ce qu'elle croyait être l'inutilité de sa vie. Même le vendredi, de nombreuses personnes étaient admises dans la chambre d'Alexandrina. La dernière extase publique eut lieu le 25 décembre 1953.

3-3-3-Le martyre du corps

Il est impossible de parler de toutes les souffrances qu'Alexandrina a dû endurer dans son corps. Nous nous contenterons de ne rapporter que quelques faits obscurs, même pour l'intéressée qui écrit à son directeur:

"Je ne comprends pas. Quelques-unes de mes côtes se sont déplacées. Le médecin me disait que ce n’était rien... Je ne peux m’appuyer sur celles-ci qu’au prix d’un grand sacrifice, car je ne supporte même pas que les couvertures reposent sur mes côtes. Et le pire c’est que ce sont les côtes du côté droit, sur lequel j’avais l’habitude de me reposer... Même sans être tombée, le bon Jésus a fait que mes côtes se déplacent. Le médecin m’a dit qu’il les avait trouvées ainsi. Mon Père, je ne comprends pas, et je vous demande, par l’amour de Dieu, de m’expliquer si toutes les contrariétés viennent du Seigneur, ou si elles peuvent aussi venir du démon. En effet, dernièrement, des faits se sont produits qui semblent bien être son œuvre... (Lettre du 22 juin 1934 au Père Mariano)

J’ai l’impression que les os de ma poitrine touchent ceux de mon dos et me causent de telles angoisses que je ne sais plus comment me placer. Quand les douleurs sont plus fortes, je me place quelques minutes par moitié sur le lit et l’autre partie de mon corps sur les genoux de Deolinda. Ceci oblige ma sœur à passer les nuits en ma compagnie. Même parler m’est douloureux." (Lettre du 16 juillet 1934 au Père Mariano)

IV

La vie spirituelle

4-1-L'Eucharistie

Alexandrina eut depuis toujours un attrait puissant pour l'Eucharistie. Déjà le 1er mai 1935 elle priait Marie: "Mère de Jésus et ma Mère, écoutez ma prière : je vous consacre mon corps et mon cœur. Purifiez-le, Mère très Sainte, remplissez-le de votre amour. Placez-le vous-même auprès des Tabernacles de Jésus, afin qu’ils servent de lampes jusqu’à la fin du monde." Elle se confiait aussi à Jésus, et déjà on peut discerner la mission que bientôt Jésus lui confierait:

"O mon cher Jésus, je m’unis, en esprit, à partir de ce moment et pour toujours, à toutes les Hosties contenues dans tous les ciboires de la terre, dans chaque lieu où vous habitez sacramentellement. C’est là que je veux passer tous les moments de ma vie, constamment, de jour comme de nuit, dans la joie ou la tristesse, seule ou accompagnée, à vous consoler, à vous adorer, à vous aimer, à vous louer, à vous glorifier.

Ô mon Jésus, j’aimerais faire tomber continuellement sur vous, de jour comme de nuit, autant d’actes d’amour que de gouttes de pluie fine tombent sur la terre. Je voudrais que toutes les créatures de la terre en fissent de même, afin que vous soyez aimé de tous. Écoutez ces vœux de mon cœur et acceptez-les comme si déjà je vous aimais. O Jésus, je voudrais qu’il n’y eût pas un seul Tabernacle dans le monde, en tout lieu où vous habitez au Saint-Sacrement, où je ne fus à vous redire, sans cesse, à chaque instant de ma vie: Jésus, je vous aime; Jésus, je suis toute à vous. Je suis votre victime, la victime de l’Eucharistie, la petite lampe de vos prisons d’amour, la sentinelle de vos Tabernacles!"

4-2-La mission d'Alexandrina auprès des tabernacles

4-2-1-Le canal

Un jour, Jésus dit à Alexandrina:

"Tu es comme le canal par où passeront les grâces que Je veux distribuer aux âmes et à travers lequel les âmes viendront à moi. Je me sers de toi afin que beaucoup d’âmes viennent à moi: par ton intermédiaire, beaucoup d’âmes seront stimulées à m’aimer dans la très Sainte Eucharistie."

Et encore:

"Je choisis les faibles pour les rendre forts. Sous leur faiblesse Je cache mon pouvoir, mon amour et ma gloire. Oublie le monde et offre-toi à moi. Abandonne-toi entre mes bras: Je choisirai tes sentiers. (Lettre du 27 septembre au Père Mariano) La mission que je t’ai confiée, ce sont les tabernacles et les pécheur... Par toi, beaucoup, beaucoup de pécheurs seront sauvés; non par tes mérites, mais par les miens. Je cherche tous les moyens pour les sauver...

Veux-tu vraiment consoler et aimer ton Époux, l’Époux des âmes vierges que j’aime avec prédilection? Viens dans mes tabernacles, reste là, vis là, et donne-moi ton corps pour que je le crucifie, afin de satisfaire à mes desseins. Sois ma victime de réparation pour les pécheurs du monde entier; c’est ainsi que tu me consoleras beaucoup... Ne tardez pas à faire connaître tout ce que Je vous communique au sujet de l’Eucharistie. Vous n’avez que cette médecine. C’est de celle-ci que naissent les paratonnerres pour éloigner la divine Justice."

4-2-2-La mission d'Alexandrina

Alexandrina demanda à Jésus ce que qu'elle pouvait faire pour l’aimer comme il le désirait. Jésus répondit:

Viens dans mes tabernacles; viens me consoler; viens réparer. Ne cesse pas de réparer; donne-moi ton corps pour que je le crucifie. J’ai besoin de beaucoup de victimes pour soutenir le bras de ma justice et j’en ai si peu! Viens les remplacer... Fais que je sois aimé de tous dans mon Sacrement d’Amour, le plus grand de mes Sacrements et le plus grand miracle de ma divine sagesse...

La mission que je t’ai confiée, ce sont les tabernacles et les pécheurs... Combien de victimes j'ai choisies... Combien de victimes j'ai choisies et qui se sont refusées!... Combien j'en ai appelées et qui ne m'ont pas entendu!... Combien j'en ai invitées à une grande élévation vers moi et je n'ai rien obtenu! En toi Je me suis consolé; de toi J'ai tout reçu!... Si tu voyais le nombre d'âmes qui se sont sauvées grâce à toi, et spécialement en ces dernières années par ton jeûne! (Journal: 22 décembre 1934.)

Cherche des âmes qui m'aiment dans le sacrement de mon Amour, qui prennent ta place quand tu iras au ciel. Invite le monde à la PRIERE, à la PENITENCE, à s'enflammer d'amour pour Moi. Pauvre monde!... Que deviendra-t-il, s'il n'écoute pas cet appel divin?"

En 1936, Jésus lui dit encore:

"Combien Je t’aime ! Quand tu te sens froide, c’est moi qui, chaque fois d’avantage infuse en toi mon amour. Quand Je ne te parle pas, c’est pour t’inspirer beaucoup plus de foi en moi. Ne t’ai-je pas dit que je ne t’abandonnerais jamais et ne m’éloignerais jamais de toi? Je t’aime tellement! Viens à mon école; apprends de ton Jésus à aimer le silence, l’humilité, l’obéissance et l’abandon. Viens dans mes Tabernacles... Prosterne-toi devant moi et demande-moi pardon pour ton découragement et pour ton infidélité."

Et la très Sainte Vierge lui indiquait aussi le moyen d'apaiser la Justice divine si outragée: «Parle aux âmes, parle-leur de l'EUCHARISTIE, parle-leur du ROSAIRE!...»

4-2-3-Les exigences de Jésus

"Avise ton directeur spirituel que j’exige que l’on prêche et que l’on propage la dévotion aux Tabernacles, et davantage encore: qu’elle soit rallumée dans les âmes. Je ne suis pas resté sur les autels par amour uniquement de ceux qui m’aiment, mais pour l’amour de tous; même en travaillant on peut me consoler.

Prie pour les prêtres: ce sont les ouvriers de ma vigne; la récolte dépend d’eux..."

4-2-4-Les plaintes de Jésus

Jésus se plaint à son épouse fidèle de la solitude dans laquelle les hommes le laissent dans son Sacrement d'amour:

"Veille sur mes tabernacles. J’y suis si seul dans un très grand nombre d'entre eux... Des jours et des jours passent sans que quelqu’un me rende visite. On ne m’aime pas, on ne répare pas. Quand ils y viennent, ils le font soit par habitude ou par quelque obligation. Sais-tu ce qui ne cesse pas de tomber sur mes tabernacles? C’est cette chaîne de péchés et de crimes. Ce sont là les actes d’amour qu’ils y déposent; c’est ainsi qu’ils me consolent; c’est ainsi qu’ils réparent; c’est ainsi encore qu’ils m’aiment!... Toi, console-moi et aime-moi, et moi je te consolerai dans toutes tes afflictions et dans tous tes besoins.

Ma fille, n’as-tu pas compassion de moi?... Je suis seul et abandonné, dans mes tabernacles, et tellement offensé! Viens me consoler, viens réparer; réparer pour tant d’abandon..."

Notre-Seigneur ne cesse pas de renouveler ses demandes au sujet de ses Tabernacles.

"Viens, ma fille, viens t’attrister avec moi; viens me tenir compagnie dans mes prisons d’amour; viens réparer tant d’abandon et d’oubli!... Console-moi et aime-moi et moi, je te consolerai dans toutes tes afflictions et dans tous tes besoins… Dis au monde entier qu'il écoute la voix de son pasteur, le Pape, laquelle est la voix de Jésus. Je veux de l'amour, de la pureté d'âme, changement de vie. Que la voix du Saint-Père soit pour le monde un aussi vibrant appel que celui de Noé... Qu'il parle aux nations et à ses gouvernants, afin qu'un terme soit mis à tant d'immoralité...

Donne-moi ton cœur, que je le place dans le mien, afin que tu n’aies pas d’autre amour que le mien et celui de mes affaires." (Lettre du 5 octobre 1934 au Père Mariano)

"Visiter les prisonniers dans leurs cachots et les consoler est une œuvre de miséricorde. Moi, je suis prisonnier et prisonnier par amour; je suis le Prisonnier des prisonniers."

4-3-L'union à Jésus au Saint-Sacrement. La présence réelle

Jésus enseigne Alexandrina qui écrit: "Jésus m’a dit que de la même manière qu’il est fidèle à demeurer en moi pour me consoler, que moi aussi je devais être fidèle à demeurer en esprit auprès de ses Tabernacles, pour le consoler et l’aimer; que je devais lui donner mon corps pour être victime; que des milliers de victimes ne seraient pas de trop pour réparer tant de péchés et les crimes du monde...

Comme Madeleine, tu as choisi la meilleure part. Aimer mon Cœur! M’aimer crucifié, c’est très bien. M’aimer dans mes tabernacles, où tu peux me contempler, non pas des yeux du corps mais de ceux de l’âme et de l’esprit; où j’habite avec mon Corps, mon Âme et ma Divinité comme dans le Ciel, c’est choisir ce qu’il y a de plus sublime."

On remarque que Jésus insiste sur une notion spirituelle que nous avons beaucoup oubliée, peut-être parce que nous ne la comprenons plus: l'appel de certaines âmes à devenir des victimes de son amour. Être victime au pied des tabernacles pour "consoler" son amour, sa solitude, son abandon, pour rester avec Lui là où Il est réellement présent. Jésus, en effet, parle de sa présence réelle dans les tabernacles:

"Ils ne croient pas à mon existence. Ils ne croient pas que j’y habite. Ils blasphèment contre moi. D’autres croient que j’y suis, mais ils ne m’aiment pas, ne me visitent pas: ils vivent comme si je n’y habitais... Viens dans mes tabernacles; elles sont à toi mes prisons; je t’ai choisie pour m’y tenir compagnie, dans ces abris qui sont très souvent, extérieurement, si pauvres! Mais à l’intérieur, ô, quelle richesse! C’est la richesse du Ciel et de la terre!...

Veux-tu me consoler ? Veux-tu consoler le sanctificateur de ton âme ? Va dans les tabernacles !... Consoler les attristé, c’est faire œuvre de miséricorde... Et moi je suis si triste; je suis si offensé !...

Là tu peux servir de victime pour les péchés du monde, en cette période où le monde se révolte contre moi et contre mon Église."

4-4-La Croix

Nous avons déjà parlé de l'amour qu'Alexandrina manifestait pour les croix que lui envoyait Jésus. Cependant, à mesure que le temps passait, Alexandrina découvrait davantage le sens de ces croix. Le 1er septembre 1934, dans une lettre destinée à Sãozinha, elle écrit:

"Ma bonne petite sœur,

Je vous appelle ainsi, non seulement parce que vous traitez avec charité la plus indigne des enfants de Dieu, mais aussi parce que toutes deux, nous recevons du Seigneur la croix bénie de chaque jour. Celle-ci, portée avec amour et résignation, est un moyen efficace pour nous élever de plus en plus dans l’amour de Jésus; pour nous sanctifier et pour aider, par nos souffrances, les âmes qui, sourdes à la voix de Jésus et aveuglées devant sa lumière, s’abandonnent aux plaisirs du monde sans jamais penser à leur salut.

Combien elle est belle notre mission! En ce qui me concerne, j’avoue me considérer indigne d’un aussi heureux sort!... J’ai souvent dit que j’étais venue en ce monde pour travailler, souffrir et offenser le Seigneur. Triste vérité... car, je l’ai déjà tant offensé! C’est celle-ci la plus grande peine qui m’aiguillonne toujours. La souffrance est ma plus grande consolation, et je ne l’échangerais pas contre le monde entier. Quelle ingrate je ferais, si je refusais de donner mon corps, qui ne vaut rien, à Celui qui, à cause de moi, a tant souffert!... À Celui qui désire se procurer beaucoup de victimes d’amour pour sauver les âmes!

Depuis seize années, la maladie, jour après jour, s’est propagée dans tout mon corps... et depuis dix années je suis prisonnière dans mon lit sans pouvoir me lever... Combien j’ai été favorisée par le Seigneur! Combien suave est le joug sous lequel il me tient! Je reçois ceci comme une preuve d’amour de la part de Jésus pour mon âme. Que soit béni Celui qui n’a pas dédaigné mon indignité!"

De telles paroles nous étonnent, nous scandalisent même, peut-être. Pourtant la plupart des saints et des mystiques ont jugé leurs souffrances de cette façon. "Comprenne qui pourra!" peut nous redire Jésus.

Alexandrina comprenait bien, elle; aussi Jésus lui demandait-il toujours plus. Voici ce qu'elle écrivit à son directeur, le Père Mariano Pinho, en septembre 1934, après que Jésus lui eut demandé «Donne-moi tes mains!"

"... Mon Père, je vais moi aussi faire un grand sacrifice. Notre-Seigneur le sait bien, et vous-même, vous pourrez vous faire une idée de ce que ceci me coûte. Mais avant de le faire, je l’ai offert au bon Jésus...

Jeudi 6 septembre, Monsieur le Curé est venu apporter la Communion à une voisine malade et, par la même occasion, il est venu me la donner. Après avoir communié, je me sentais froide et incapable de toute action de grâces; mais, loué soit mon Jésus, car il n’a regardé ni ma froideur ni mon indignité. Il m’a semblé entendre alors ces paroles: «Donne-moi tes mains!"

Il faut encore que je vous dise que vendredi et aujourd’hui Notre-Seigneur a renouvelé ses demandes. Il m’a recommandé aussi l’obéissance en tout, comme je vous l’ai déjà expliqué.

S’agit-il d’une illusion de ma part? O mon Jésus, pardonnez-moi si je vous offense, mais je ne veux pas vous offenser... je le fais par obéissance… [3]

«Il m’a demandé ceci deux fois...»

"Il m’a demandé ceci deux fois, le 6 et le 8 septembre.

Je ne sais pas expliquer mon tourment, parce que je ne peux pas écrire [4],. Je ne voulais rien dire à ma sœur, mais je ne voulais pas non plus le taire, car j’ai compris que je ne devais pas le faire, taire la parole de Dieu: je devais tout dire à mon directeur spirituel.

Je me suis décidée à faire le sacrifice et j’ai demandé à Deolinda d’écrire tout ce que je lui dicterais. Nous l’avons fait sans échanger le moindre regard. La lettre étant écrite, tout cela est resté entre nous et nous n’en avons plus parlé."

Alexandrina raconte dans son journal:

"Si jusque là toutes les lettres de mon directeur spirituel me rendaient joyeuse, à partir de ce moment, je n’en éprouvai plus la moindre consolation: je vivais dans la crainte qu’il me désapprouve et me dise que tout cela n’était qu’illusion. J’avais cédé à l’invitation du Seigneur, mais je pensais que les sacrifices qu’Il me demandait n’étaient que ceux résultant de ma maladie, même si majorés; il ne m’était pas venu à l’esprit qu’Il me ferait passer par des phénomènes singuliers.

Le directeur m’a exigé de tout écrire et, pendant deux ans et demi il ne m’a jamais dit qu’il s’agissait bien de choses de Dieu. Ce silence m’a fait beaucoup souffrir."

Paulette Leblanc


[1] Vers le mois de novembre 1940, une bienfaitrice de Lisbonne, Fernanda dos Santos, offrit la somme dégageant la maison de l'hypothèque. Le terrain ne fut libéré qu'en 1941.
[2] Pendant un an, le Père Mariano Pinho demeura très hésitant, ce qui fut la cause de doutes et d’indicibles souffrances pour Alexandrina.
[3] Le Père Pinho ne désirait pas qu'elle parle de ces choses, et il lui avait recommandé une stricte obéissance. Mais après cette lettre, le père Mariano demanda à Deolinda d'observer soigneusement tout ce qui se passerait, d'en prendre note, de l'informer, et de servir de secrétaire à Alexandrina pour tout ce qu'elle aurait besoin d'écrire.
[4] Dans une lettre du 7 avril 1934, au Père Mariano Pinho, Alexandrina  expliquait:“... il m’est impossible de tenir la plume, même pour à peine quelques instants... On ne m'a jamais gratté les os, mais j’ai l’impression que cela doit produire le même effet...”

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